who the hell are you?/ rozie

Prenant la pause devant les photographes, leurs flashs aveuglant le producteur, il souriait comme un imbécile et détestait cette partie du travail. Lui ce qu’il voulait, c’était faire des films, transposer son idée sur l’écran, il n’en avait rien à faire de la célébrité. Bien sûr, il était ravi de pouvoir vivre de sa passion, l’inverse aurait été totalement stupide, mais il se sentait aussi totalement stupide à cet instant précis. Comme il allait détester les deux heures qui allaient suivre, devoir parler devant les spectateurs venus à l’avant-première de son film -foule composé de journalistes principalement & de personnes du beau monde invités-. Il allait pouvoir voir toutes les petites erreurs qu’il avait commise en grand écran, pour son plus grand déplaisir. Une fois son film terminé, une fois l’éditage achevé, il avait du mal à le regarder plus de deux fois. Il était fier de son travail, là n’était pas le problème. Jamais, au grand jamais, il ne renierait ses anciens films mais il serait parlerait plus de leurs défauts que de leurs qualités. Perfectionniste dans l’âme, il était comme ça, toujours en train de remettre en question son travail, toujours en train de voir ce qu’il aurait pu faire pour améliorer un plan, ou autres. Remettant son costume en place, il s’avança devant la scène avec un petit sourire sur le visage, accompagné des acteurs principaux. « Merci à tous d’être venu ce soir. Nous sommes très heureux de vous présenter For Many Years, en espérant qu’il vous plaira. » Il n’avait jamais été particulièrement doué pour présenter ses films, ne sachant quoi dire à un public pareil. Restant quelques secondes sous les applaudissements, il regagna rapidement sa place au premier rang avec l’équipe du film et les acteurs principaux. Au bout d’une petite demi-heure, il s’éclipsa de la salle de cinéma et alla dans ce qui servirait de lieu de rencontre entre l’équipe & les journalistes, ainsi que les invités. Un mini-buffet ainsi qu’un bar avait été installé pour l’occasion. Histoire que les invités puissent se noyer dans l’alcool, ou en tout cas que Nate puisse. Si seulement c’était son style … Non, il commanda juste une bouteille de bière, et se retrouva avec un verre de champagne. Le distributeur n’avait pas fait les choses à moitié, mini-four, mini-mignardise, champagne. Il savait que c’était la date la plus importante, Los Angeles, il n’avait pas le droit de se planter ici, ni à New-York dans une semaine. Ce n’était pas comme si le film allait être distribué à l’échelle internationale, il était déjà diffusé dans 1,500 cinémas américains & serait en VOD dès demain. C’était pas mal. Un pas de plus vers l’international. Sirotant son verre, il avait déjà sorti son téléphone sachant qu’il lui restait 1h30 à patienter & que ses patrons n’accepteraient pas son absence une fois la séance terminée. Il n’avait pas prévu par contre d’être accompagné aussi rapidement par une jeune femme qu’il ne connaissait pas mais qui était scotché à l’écran de son téléphone. Il ne pu s’empêcher de la fixer, cela faisait à peine une heure que le film avait commencé & elle était dehors, il était légèrement blessé dans son égo.

Rozie s'était faite invitée à une énième avant première pour un énième film dont elle se fichait éperdument et même si en temps normal elle aurait tout bonnement déclinée et se serait contentée de trouver une autre alternative à sa soirée, sa mère l'avait prise de court et disons qu'entre supporter un pseudo repas de famille ou être ici et profiter du champagne le choix était vite fait. Si elle était persuadée que ce film serait tout sauf passionnant du moins à ses yeux, elle voyait le bon côté des choses c'était l'occasion pour elle de sortir avec une nouvelle robe. Elle n'avait même pas prit la peine de s'informer un peu plus sur ce fameux film parce qu'il était bien plus qu'évident qu'elle entrerait dans la salle histoire de faire bonne figure mais qu'elle prendrait la porte aussi rapidement qu'elle était arrivée à moins peut-être que ça ne soit un chef d’œuvre mais vue son côté difficile elle en doutait fortement. D'ailleurs si ces salles de cinémas avaient été un peu plus éclairées elle se serait fait une joie de lire le dernier Nylon Magazine mais malheureusement pour elle, elle allait devoir prendre son mal en patience en attendant que la petite présentation habituelle du film ne se déroule. Rozie roula des yeux lorsqu'elle aperçue enfin les quelques acteurs présent, le fait étant qu'en se rendant ici elle avait espérer tomber sur son amie Ginger mais elle était désormais confrontée à une déception certaine. Non pas qu'elle ne soit associable loin de là mais le cœur n'y était véritablement pas ce soir et elle était bien trop sobre et seule pour apprécier ne serait-ce qu'un minimum ce qui se déroulait sous ses yeux. Après quelques soupirs et une envie incommensurable de se ronger les ongles tant elle ne supportait plus d'être assise sur ce siège qu'elle jugeait comme étant fortement inconfortable, la jeune femme réalisa qu'il était grand temps pour elle de faire ce qu'elle savait faire de mieux : s'éclipser et attendre que la fameuse pseudo soirée ne commence une fois le film achevé. Elle espérait juste qu'aucun journaliste mal intentionné ne se trouverait dans les parages parce qu'elle avait passer plus de temps à se retenir de jouer à candy crush qu'à suivre quoique ce soit et quand bien même ça aurait été le cas, elle ne voulait tout bonnement pas être à l'origine d'une critique plutôt injuste. Rozie sortie automatiquement son téléphone de son sac à main presque soulagée de revenir à la réalité et surtout d'être enfin capable de répondre à ses nombreux sms et alors qu'elle était sur le point de téléphoner à Ginger histoire de savoir quelle était son excuse pour lui avoir fait faux bonds son regard croisa celui d'un blondinet qui lui disait vaguement quelque chose mais qu'elle n'arrivait cependant pas à replacer. Si seulement elle avait fait preuve de deux minutes d'attention elle aurait réalisée que c'était le réalisateur du film qui était au bar et non un spectateur aussi désintéresser qu'elle ne pouvait l'être. Quoiqu'il en soit puisqu'elle n'était désormais plus la seule et unique personne à attendre en silence, elle comptait bien tirer profit de cette situation surtout depuis qu'elle avait bien vue qu'il la fixait avec grande insistance. « Un problème peut-être? » lança-t-elle alors avant d'aller dans sa direction et de prendre place juste à côté de lui, attrapant au passage une coupe de champagne parce qu'elle n'attendait que ça : boire pour oublier qu'on lui avait foutue tout ses plans en l'air. Il était clair que cet homme dont elle ignorait tout semblait quelques peu mal à l'aise mais ce n'était définitivement pas à cause d'elle et c'était ça le plus intriguant. « C'est bizarre d'habitude je suis la seule qui traîne dans le coin avant que les lumières ne se rallument! » C'était un fait indéniable, elle passait plus de temps à descendre les magnums de champagne achetés à l'occasion qu'à être une spectatrice modèle et elle s'était attendue à tout sauf à trouver une autre personne optant pour sa technique de replis. « Je suis Rozie ! Et tu devrais sans doute enlever cette cravate et respirer un grand coup parce qu'on dirait que tu es sur le point de faire une attaque. » Encore une fois ça aurait pourtant dû lui faire tilt mais c'était à croire qu'elle aimait simplement se mettre dans des situations qu'on pouvait considérer comme embarrassantes.

Il avait l’air totalement stupide à fixer la jeune femme qui se trouvait en face de lui. C’est juste qu’il était totalement surpris de voir quelqu’un ici, aussi tôt après le début de la projection du film. Lui ne pouvait pas supporter de voir son oeuvre sur grand écran, que l’un des acteurs l’aient rejoint ici, encore il pouvait comprendre. Eux aussi pouvaient avoir du mal à regarder leurs performances mais, elle … Elle n’avait aucune raison de se trouver ici, à part si elle avait détesté le début du film. Bien sûr que Nate était critique envers lui, qu’il voyait les défauts de réalisation, il était un perfectionniste, et une réaction pareille était totalement compréhensible. Comme il savait que cette personne qui se trouvait en face de lui avait parfaitement le droit de ne pas aimer ce qu’elle voyait. Qu’elle avait le droit à son propre avis. Ce n’est que lorsqu’elle s’adressa à lui qu’il quitta son regard, décidant de regarder le sol, comme si ce dernier était une oeuvre d’art, digne de View in the Avon Gorge de William Turner. Ce genre de situation ne lui était encore jamais arrivée … Cependant, il restait un homme, elle, une femme & sa réaction était totalement ridicule. Il était ridicule. Elle avait peut-être un avis constructif, peut-être qu’elle l’aiderait à trouver la petite chose qui le dérangeait aussi, pour qu’il puisse s’améliorer sur son prochain film. Se détendant quand il comprit qu’elle n’avait aucune idée de qui il était, du fait qu’il puisse prendre sa présence ici comme une insulte, il la regarda de nouveau, alors qu’elle était déjà en train de descendre sa première coupe de champagne. « Nate » dit-il en souriant alors qu’il enlevait la cravate comme venait de lui conseiller la dite Rozie. Une fois dans sa poche, le premier bouton de sa chemise ouvert, il se sentait un peu mieux. « Et je suis d’habitude le seul ici. » Son record, une heure, pour son précédent film. Lors de la première projection de son tout premier film, il n’avait pas tenu quinze minutes. Déjà à son quatrième film, il avait l’habitude d’attendre une heure à une heure & demi, seul. Il avait ses habitudes. Répondre à ses mails, parler aux serveurs, parfois même faire une petite sieste dans un coin du cinéma, toujours un réveil pour être présent lorsque la foule arrivait dans la salle à la fin de la projection. Il ne voulait pas la déranger. Bien qu’il avait quelques questions à lui poser. Pourquoi était-elle ici ? Qu’est-ce qui l’avait poussé à quitter cette salle de cinéma. « Il était nul ce film, hein ? » Pitoyable. Mais qu’il était pitoyable. Et puis si ça se trouvait, elle avait comprit qui il était quand il lui avait dit son prénom. Au vue de sa tête, ce n’était pas le cas. « Te gênes pas pour moi, si tu veux téléphoner, tu peux. Je te promets que je n’écouterais pas ta conversation. Pas que j’avais prévu de l’écouter à la base. Avant que tu me remarques. » Un véritable gentleman, right ? Il avait bien vu qu’elle avait rangé son téléphone, dès l’instant où elle avait compris qu’il la regardait.