take me back to the start (isaac)

I remember it now, it takes me back to when it all first started
But I've only got myself to blame for it, and I accept that now
It's time to let it go, go out and start again
But it's not that easy

Samedi après-midi. Le beau temps était de mise. Le soleil venait accompagner la journée des habitants de Belmont Springs. De quoi mettre de bonne humeur la jolie Jenkins. Elle ne supportait pas la grisaille, encore moins le week-end. Azuria avait ses petites habitudes ici. Elle vivait à Belmont Springs depuis si longtemps qu’une certaine routine avait fini par s’installer dans sa vie. Aujourd’hui était le temps parfait pour aller profiter d’un bon café en terrasse. Si durant de nombreuses années elle n’avait pas eu le moyen de se payer ce genre de choses, désormais elle ne s’en privait pas. C’était l’un des rares plaisirs qu’elle s’accordait, ne voulant pas donner trop d’importance à l’argent. Elle ne souhaitait pas devenir comme ceux qui avait foutu la vie de son père en l’air et la sienne par la même occasion. Mais le café était son péché mignon. La jeune femme était le genre de personne qui ne pouvait passer une journée sans avoir bu au moins une tasse de café. C’était une mauvaise habitude qu’elle avait pris plus jeune et depuis elle n’avait su s’en défaire. Voilà pourquoi la jeune femme franchit quelques  minutes plus tard la porte de colonna & smalls avec une élégance qui lui était propre. Elle posa ses lunettes de soleil sur le sommet de sa tête, s’accoutumant à la lumière de la pièce. Et sans s’y attendre c’est à un fantôme du passé qu’elle fit face. Son cœur s’emballa lorsqu'elle croisa son regard. « Isaac… » souffla-t-elle, sous le choc.  Ses yeux,  ils étaient toujours aussi perçants, aussi captivants. Une douce chaleur s'empara de son être tout entier. Une sensation qu'il était le seul à lui prodiguer. Instantanément des milliers de souvenirs l'assaillirent, la replongeant dans une période où le bonheur était maître. Elle n'avait aimé qu'un seul homme dans sa vie et il se trouvait face à elle. Elle se sentait à la fois si bien et si mal, tiraillée entre le plaisir de le revoir et le vide qu’il avait laissé en elle depuis qu’il était sorti de sa vie. Des années étaient passées sans qu’elle ne voie son visage, sans qu’elle n’entende sa voix. Des années de silence. Elle ne lui en voulait absolument pas, elle était tout aussi fautive que lui dans l’histoire. Ils avaient fait leur vie chacun de leur côté comme chacun le fait lors d’une rupture. Ce n’avait pas été facile. Les mois qui avaient suivi leur séparation ont été extrêmement durs pour elle. Par fierté elle n’avait rien montré. Parce qu’elle n’aime pas être vulnérable. Parce qu’elle n’aime pas être faible. Elle s’était cachée derrière des sourires et des rires qui n’avaient en réalité aucun sens à ses yeux. Isaac lui manquait beaucoup, sûrement même beaucoup plus qu’elle ne voulait se l’avouer. Mais tout était devenu si différent entre eux… Il avait changé. Détruit par une guerre qui n’était pas la sienne. Doucement ils s’étaient éloignés, jusqu’à finir par ne plus savoir pourquoi ils étaient encore ensemble. Alors ils s’étaient quittés, le cœur serré. Bien sûr, depuis, elle avait eu quelques aventures par ci par là, elle avait rencontré des hommes mais ce n’était jamais rien de bien sérieux. Et en voyant le jeune Naveen-Hawk elle réalisa alors qu’elle n’aimerait sûrement plus jamais comme elle avait pu l’aimer lui. Cela avait été si fort, si inattendu… Comment espérer ressentir cela à nouveau un jour ? Elle n’était même pas certaine que ses sentiments pour lui soient complètement éteints. C’était peut-être pour cela qu’elle ne parvenait plus à s’investir, qu’elle fuyait toute forme d’attachement. Elle ne voulait plus sentir son cœur se briser dans sa poitrine. Elle ne voulait plus revivre la perte et le manque. Elle l’avait déjà vécu avec son père, puis avec Isaac. Et bien que ce fût deux situations différentes elle s’était sentie terriblement seule et perdue. Elle avait l’impression que la Terre s’était dérobé sous ses pieds et qu’elle plongeait dans un gouffre sans fin. Ce sentiment s’était atténué avec le temps, mais il restait un vide en elle qu’elle n’était parvenu à combler. Un vide qui semblait se remplir en sa présence. Mais elle ne voulait y penser davantage. Tout était trop compliqué. Il n’y avait plus d’espoir entre eux. Elle devait tirer une croix définitive sur lui et leur histoire. Elle devait tourner la page, mais parfois certaines pages sont plus difficiles à oublier que d’autres... Isaac était l’une d’elle. Et elle comprit alors cet instant que jamais elle ne pourrait l’oublier. Qu’elle pourrait tenter d’arracher cette page de son histoire, elle resterait présente pour toujours. Elle allait simplement devoir vivre avec.

I remember it now, it takes me back to when it all first started
But I've only got myself to blame for it, and I accept that now
It's time to let it go, go out and start again
But it's not that easy

A peine entendit-elle le son de sa voix qu’un frisson vint la parcourir. Wow, c’était toujours impressionnant l’effet qui lui faisait. Elle oubliait parfois tout ce qu’il pouvait provoquer en elle. Elle ne savait plus ce que cela faisait d’être amoureuse, obnubilée par son désir de vengeance elle mettait de côté tous les autres sentiments. Depuis leur rupture elle s’était concentrée sur son objectif, en grande partie pour ne plus penser au fait qu’Isaac ne serait plus jamais sien. Elle avait encore parfois du mal à accepter cette réalité. Une réalité qui ne lui correspondait pas. Parce que sans lui, rien n’avait vraiment de sens. Elle avait beau se convaincre du contraire, au fond, elle savait que c’était faux. Elle n’était plus que l’ombre d’elle-même. Une ombre qui cherchait à se raccrocher à quelque chose, à quelqu'un. En vain… Personne ne semblait voir son désespoir, ni même sa solitude. Personne ne semblait comprendre à quel point elle se sentait vide sans lui. Parce que personne n’essayait de creuser sous la surface… Personne ne voyait la tristesse derrière son sourire. Tout le monde se contentait de ce qu’elle pouvait bien mettre et ça lui allait comme ça. Elle ne voulait pas montrer sa vulnérabilité. Isaac était sa faille, le point sensible sur lequel il ne fallait pas appuyer. Parce que son cœur saignait encore de son absence. Il lui arrivait quelque fois de se réveiller dans la nuit et de le chercher à ses côtés. Mais il n’était plus là… Et ce depuis des années déjà. Le temps passait si vite… Elle avait parfois l’impression que leur histoire datait d’hier. Et d’autres jours, c’était comme si une éternité s’était écoulé depuis, tant les jours pouvaient lui paraître longs sans le jeune homme dans sa vie. Quelle surprise ce fut pour elle de le voir aujourd'hui. Elle ne s'attendait pas à le voir ici. Drôle d'ironie quand on savait  qu'ils habitaient là même ville depuis tout ce temps. Mais bizarrement elle ne s'était jamais préparée à cette éventualité, croyant naïvement qu'ils pourraient s'éviter pour toujours. Finalement, elle se demandait comment ils avaient réussi à ne jamais se voir depuis toutes ces années. Cette ville n'était pas si grande pourtant... Le choc en était alors d'autant plus fort. Parce que c’était si inattendu, si surprenant qu'elle ne savait comment réagir. Mais son cœur qui s'emballait dans sa poitrine témoignait des sentiments qu'elle éprouvait toujours à son égard. Sentiments qu'elle était sûre d'avoir fait taire il y a des années. Seulement parfois, on ne pouvait aller contre l’inévitable. Malgré ses tentatives, son cœur ne voulait cesser d’aimer Isaac. Et puis de toute façon, le voulait-elle vraiment elle aussi ? Elle n’en savait rien… tout était si confus quand il s’agissait du beau brun qu’elle-même se sentait totalement perdue. Elle qui était pourtant toujours si sûre, si confiante, elle perdait le contrôle. « Tu vas bien ? » Elle ne savait quoi répondre. Que pouvait-elle dire après tout ? Ils ne s’étaient pas vus depuis si longtemps… « Ça va oui… » répondit-elle pas vraiment convaincue. « Et toi ? » Bizarrement, elle redoutait sa réponse. Parce qu’elle avait peur de voir à quel point il avait avancé sans elle, alors qu’elle, elle avait l’impression de faire du surplace. Elle ne lui avait demandé que par simple politesse.  C’était une habitude qui s’était ancrée doucement dans nos vies mais que personne ne pouvait expliquer. En réalité, qui répondait sincèrement à cette question ? Cela faisait simplement partie des formules de politesse, ni plus ni moins. Isaac ne semblait pas à l’aise, pas plus qu’elle en tout cas. Elle le voyait à sa façon de se comporter, à ses gestes et ses mimiques qui le trahissaient bien plus qu’il ne devait le penser. « Tu veux te joindre à moi ? A moins que t’aies autre chose de prévu, je ne veux pas t’embêter. » Elle ne s’attendait pas à cela, mais finalement l’intention la touchait. C’était probablement pour eux le moment de discuter, de mettre les choses à plat. Ce n’était peut-être que pour le temps d’un café mais ils allaient pouvoir se retrouver. Juste un peu. Juste comme ça. Un fin sourire vint étirer ses traits. « Avec plaisir. Et tu ne m’embête absolument pas, ne t’en fais pas pour ça. » Elle suivit le jeune homme jusqu'à une table. Elle s’assit face à lui, un peu mal à l’aise. Elle avait beau connaître Isaac par cœur, elle ne savait pas vraiment comment agir en sa présence. Tout semblait différent désormais… De l’eau était passée sous les ponts. Elle n’était même pas certaine qu’il soit resté le même après toutes ces années. D'ailleurs, avait-elle changé elle aussi ? Elle n’en savait rien. Sa vie était un ensemble de complications, comme si rien ne pouvait être simple et sans encombre. Elle se sentait parfois déboussolée, perdue dans ses propres choix. Mais elle continuait d’avancer, elle ne lâchait rien. Guidée par son désir de vengeance. Un désir puissant et presque destructeur. Seulement à cet instant elle ne voulait plus y penser. Elle voulait se concentrer sur Isaac et sur ce qu’il provoquait en elle. « Je suis contente de te voir… » Sa voix était douce. Elle disait cela comme un aveu. Comme un secret qui n’existait qu’entre eux. « Qu’est-ce que tu deviens ? Ça fait si longtemps… » Trop longtemps… S’il savait à quel point il lui manquait. Oh oui, s’il savait…