L'intelligence, c'est comme les parachutes, quand on n'en a pas, on s'écrase. (MM)

- nom complet : Il est né Terry Keith Mortimer, mais de Terry, il ne reste plus grand-chose, sinon ses origines qu'il se garde bien de révéler. Il est devenu Montague depuis seize ans déjà, et s'est promis de ne plus jamais revenir sur ses pas. - âge, date et lieu de naissance : Montague est né à Homestead, en Floride, aux Etats Unis, un 14 Février 1979. Rien à voir avec Los Angeles et de ses gros portefeuilles quand on sait que ses parents étaient des bouseux des Everglades, et que Montague y passera les premières vingt années de sa vie. Il a aujourd'hui trente-six ans. - origines et nationalité : Montague est originaire de Floride, mais si l'on remonte encore, sa mère aurait des ancêtres européens. D'où, il ne sait pas. Pour le reste, il est citoyen Américain. - occupation, situation financière : Si Montague avait pu un jour imaginer faire le métier qu'il fait, il se serait vite pincé pour se demander où est l'arnaque. Est-ce un rêve, ou non. Délire-t-il ? Probablement pas. Et chaque matin depuis quatre ans, il se réveille dans la peau d'un flamboyant milliardaire qui tire sa fortune de son entreprise pharmaceutique connue un peu partout dans le monde. Plus les gens se meurent, et plus il fait fortune. Et ça lui plaît. Sa situation financière est donc plus qu'excellente. - statut civil : Montague est célibataire. Il l'a toujours été. Les relations à long terme, il n'a jamais accroché. Ayant toujours besoin de nouvelles... distractions, c'est quelqu'un d'assez volage. Il ne s'attache pas aux personnes, contrairement aux objets. - orientation sexuelle : Montague est hétérosexuel. Personne ne pourra vous dire le contraire, il aime les femmes. On ne le verra jamais s'intéresser à un homme, sinon pour faire affaire. - traits de caractère : Montague est quelqu'un d'extrêmement opportuniste, il essaie de tirer avantage de n'importe quelle situation. C'est le roi de la débrouille, il a toujours un plan B, voire un plan C. Il aime tout prévoir, aussi c'est quelqu'un d'organisé, qui aime avoir tout sous son contrôle. Il est intelligent, et se sert de cette intelligence autant en bien qu'en mal, car c'est avant tout un menteur. Et dans l'art de mentir, c'est un maître, doublé d'un baratineur subtil. Mais s'il aime se donner l'image d'un gentleman séducteur et séduisant, c'est aussi quelqu'un de violent, qui a du mal à contrôler ses pulsions. Un brin psychotique, il lui arrive de se perdre entre Montague et Terry quand il est seul chez lui, mais se fait une règle d'or à ne jamais rien dire à qui que ce soit de sa véritable identité, ni de ce qu'il a fait pour être à la tête de son entreprise pharmaceutique, et c'est donc quelqu'un de très secret. Il est aussi autodidacte. Il a appris à conduire une voiture tout seul, car les auto-écoles n'étaient pas nombreuses dans les Everglades. C'est par ailleurs un excellent conducteur, il ne laissera jamais personne conduire à sa place. Pour terminer, c'est surtout un caméléon. Il est capable de se fondre dans la masse sans qu'on le remarque, même si au fond, il aime charmer son monde grâce à son charisme.  - quartier de résidence : Crystal Cove Road.  - groupe : Dark Horse.

my silver spoon has fed me good

✗ 01. La main dominante de Montague est sa main gauche. Lorsqu'il était enfant, ses parents ont tenté de le contraindre à utiliser sa main droite, mais il ne s'y est jamais fait. Depuis, il possède autant d'adresse dans une main que dans l'autre, bien qu'il se sert majoritairement de sa main gauche.

✗ 02. Il déteste les Everglades. Il déteste la Floride, il déteste ce foutu endroit dans lequel il a passé la quasi totalité de sa vie. Pour rien au monde il n'y remettra les pieds. Il n'a pratiquement pas eu d'enfance, ayant appris à se débrouiller seul très tôt et à travailler plus tôt encore. Il a brisé ses chaînes dans un élan de dégoût et a quitté les eaux subtropicales pour une nouvelle vie. Quelque part, il n'était pas fait pour pourrir ici.

✗ 03. Montague a un frère. Lenny. Qui lui ressemble énormément au niveau du physique, mais pas du tout au niveau du caractère. En fait, Montague et Lenny ne se sont jamais entendus. Lenny a trois ans de moins que Montague, et avait pour habitude de suivre son aîné dans les prairies inondées et infestées d'alligators. Là où une complicité aurait dû se créer entre les deux gamins, une rivalité s'est plutôt installée, l'un comme l'autre voulant démontrer qu'il n'a pas peur du lézard de deux mètres qui rode près de leur barque. La dernière fois que Montague a vu Lenny, son poing est venu flirter avec le cartilage de son nez, et depuis, plus rien.

✗ 04. En 1999, il a vingt ans. Cela fait à peine quelques semaines qu'il a quitté la Floride et qu'il est de passage dans une ville de l'Indiana lorsqu'il fait une rencontre qui sera décisive. Elle s'appelle Emma, et elle est envoûtée. Par cette vieille chemise à carreaux, ce jean élimé et ces rangers pleines de terre. Mais surtout, par cet air perdu sur son visage. Terry n'est plus. Il est devenu Montague, et il cherche à se hisser au sommet, il ne veut pas retomber plus bas qu'il n'était. Et Emma n'est clairement pas de la même classe sociale que lui. Clairement pas. Ils sont un peu la belle et la bête, la première fois qu'ils se parlent. Montague n'est jamais tombé amoureux, et il ne tombe pas amoureux d'Emma. C'est elle, qui tombe amoureuse de lui. C'est elle, qui se fait prendre au piège. Car sitôt la conversation entamée, c'est Montague qui s'accroche à elle, autant qu'elle s'accroche à lui. Comme une tique. Elle ne se doute pas que Montague est mauvais, et comment aurait-elle pu s'en douter ? Le jeune homme qu'elle aime est bon, aimant, et non ce monstre qu'en réalité il est, pourtant. Cette monstruosité latente n'apparaîtra que plus tard.

✗ 05. Si Montague n'est pas amoureux d'Emma, alors pourquoi reste-t-il avec elle, demanderez-vous ? Pas pour son physique, bien qu'elle fut une fort jolie femme. Ni pour son caractère bienveillant et un tantinet rêveur. Non. Pour son porte-monnaie. Pour ses origines. Et pour son père. Car quand Montague entendra parler de Harvey Fauster, le père d'Emma, et surtout de son métier, de sa situation, tout deviendra clair pour lui. Dans un premier temps, il pensera qu'il ne se sera pas envoyé en l'air avec cette fille pour rien. Et puis... de sombres desseins, ambitieux mais sombres, se formeront dans son esprit tourmenté. Cette fille était riche. Sa famille l'était plus encore. Et lui, il n'avait rien. N'était rien. Rien qu'un bouseux. Alors il fera croire à Emma que c'est du sérieux. Il lui fera croire qu'il est prêt à la suivre partout où elle ira, même quitter ce trou paumé de l'Indiana dans lequel ils se sont rencontrés. Sous le charme, et véritablement amoureuse, Emma n'hésitera pas à lui présenter son père, qui le prendra aussitôt son son aile. Il lui apportera l'éducation qu'il n'avait pas, et ira même jusqu'à le considérer comme son propre fils. C'est là que la monstruosité de Montague fera son apparition. Mais ce ne sera que bien des années plus tard que Montague la tique fera couler le sang.

✗ 06. Montague changera du tout au tout. Sa nouvelle vie auprès des Fauster aura un effet incroyable sur sa personnalité. Et le caméléon se mêlera à la tique. Il viendra vivre auprès des Fauster un an après sa rencontre avec Emma. Emma, toujours aussi éperdument amoureuse de lui. Belmont Springs le fascinera. Et s'il ne perdra jamais de vue son objectif ultime, prendra cependant le temps de goûter à la vie de luxe dans laquelle son beau-père le baignera. C'était un retournement de situation des plus exquis. Lui le bouseux, lui le petit gars des Everglades, se retrouvait à siroter des martinis en bord de piscine. Et puis, ce qui devait arriver arriva. Ou plutôt, ce qu'il espérait voir arriver arriva. Harvey, qui lui vouait une affection aveugle, proposa de le former, afin qu'il reprenne l'affaire quand il ne serait plus en mesure de diriger l'entreprise. Pour Montague, tout se déroulait comme prévu. Son portrait du gendre idéal avait porté ses fruits.

✗ 07. Montague a pris goût à de nombreuses choses dans sa nouvelle vie, mais s'il y a une chose à laquelle il est particulièrement attaché, c'est la bonne cuisine. Il est friand de grande gastronomie, traditionnelle comme étrangère. Il a par ailleurs lui aussi appris à cuisiner, et ne se débrouille pas trop mal. Il a un véritable faible pour la nourriture japonaise.

✗ 08. Montague développera très vite une aversion totale pour son ancienne vie. À Emma, et à Harvey, il ne dira que des mensonges, gardant la vérité pour lui et pour lui seul. Il était conscient que quelque chose en lui dormait, quelque chose dangereux, et tout comme ses origines, il s'appliquera à cacher cette chose aux yeux de ceux qui l'avaient recueillis.

✗ 09. Aujourd'hui, c'est un homme à femmes doté d'une confiance en lui écrasante et d'un charisme que personne ne remet en question. Libéré, les paires de jambes se succèdent dans son lit, et lorsqu'on parle de lui, c'est surtout pour l'associer à l'entreprise de pharmaceutique que lui a légué Harvey Fauster quatre ans plus tôt, juste avant de décéder des suites d'une longue et épuisante lutte face à un cancer du poumon. Il est aussi tristement associé à la disparition de sa compagne, Emma Fauster, le laissant seul au sommet de l'entreprise.

✗ 10. Bien sûr, c'est à ne pas s'y tromper. Montague est responsable de la mort d'Harvey Fauster et de la disparition d'Emma.

we kings of cosmopolitan love and nihilistic suffering

Remonter la rivière à contre-courant. Encore. Toujours.

Le garçon de douze ans se tenait dans une position mi-debout mi-accroupie dans l'eau qui lui arrivait aux chevilles. Des taches de rousseur parsemaient ses pommettes et son petit nez retroussé, et ses yeux bleus étaient rivés sur les narines et les deux yeux marron qui dépassaient hors de l'eau, à peut-être deux mètres de lui. L'animal était gigantesque. Terry ne bougeait pas, ni ne quittait l'alligator des yeux. C'était une sorte de duel visuel, comme dans ces westerns qu'il n'avait jamais vu parce qu'il n'avait pas de télé. Son jardin, c'était cette prairie inondée dans laquelle il avait grandi. Il n'avait jamais eu d'ami. Jamais vu de terrain de basket de sa vie. C'était sa mère qui lui avait appris à lire, et son père qui lui avait appris à compter. Ici, il n'y avait rien. Rien que de l'eau, des alligators, et des moustiques. L'enfant qu'il était rêvait déjà d'aller au-delà des praires.

Et remonter la rivière à contre-courant. Encore. Toujours.

Terry vivait avec les alligators depuis qu'il était né. Si avant il pensait les affronter, aujourd'hui, il se considérait plus comme l'un des leurs. Un prédateur né. Il n'était qu'un garçon de douze ans, mais il avait sans aucun doute la maturité d'un garçon de seize ans. Doucement, il recula l'un de ses pieds, sans quitter l'alligator des yeux. Il connaissait les pas, c'était comme une danse. L'eau dérangée par ses mouvements venait se heurter au reptile qui ne bougeait toujours pas. Terry ne s'était encore jamais fait mordre. Celui-ci devait faire dans les trois mètres cinquante, c'était encore petit, mais pour lui, c'était bien assez grand. Il fit un deuxième pas en arrière, et l'animal ouvrit d'un seul coup la gueule, avançant en même temps de quelques centimètres. Terry sut alors ce qu'il devait faire. Il donna un coup de pied dans l'eau en direction du reptile pour l'éclabousser, puis il fit volte-face et prit ses jambes à son cou. Il connaissait le chemin, il savait où marcher. Il ne regardait même pas derrière lui. Il courait dans l'eau, marchant parfois sur la tourbe, faisant attention à ne pas glisser. Lorsqu'il aperçut sa maison, il sauta sur le ponton, les jambes trempées et les vêtements éclaboussés par sa course. Il regarda aussitôt derrière lui. L'alligator avait disparu.

Toutes ces années, à se faire domestiquer. Oh, Montague haïssait sa Floride natale, mais en natif des Everglades, il demeurait néanmoins un animal des plus sauvages. Il était l'alligator apprivoisé, le reptile, le monstre dissimulé, caché sous l'eau. À l'abri des regards et de la tentation. Il l'avait toujours su, ce qu'il était. Quand on grandit dans un tel milieu, on ne peut pas vraiment espérer être quelque chose d'autre. Bien sûr, il a changé. Il appris à changer, à se transformer. Après tout, le caméléon aussi est un proche parent des reptiles. Il s'était vite adapté à ce milieu, et on pouvait même dire qu'il avait fait les deux extrêmes. La jungle des pauvres et la jungle des riches. Il avait changé de peau, il s'était fait complaisant, avait souri quand il fallait. Sa vie était parfaite. Il avait absolument tout ce qu'il voulait. Pas tout, en vérité, mais presque. Ne manquait plus que la cerise sur le gâteau. L'apothéose. Ce pourquoi il était resté si tranquille toutes ces années, si... plaisant.

Confortablement installé dans un fauteuil en cuir, Montague huma le contenu de son verre. Seul au sommet. Il ne comprenait vraiment le sens de cette phrase que maintenant. Harvey lui avait tout donné. Son affection. Son argent. Et surtout, le plus important aux yeux de Montague : son poste. Montague but une gorgée, le whisky venant enflammer sa gorge. Il avait commencé l'année dernière. L'arsenic n'était pas compliqué à trouver, il suffisait d'avoir les bons contacts, et de savoir s'y prendre, tout simplement. L'intoxication s'était faîte petit à petit. Chronique, d'après les spécialistes. Il avait suffi d'en mettre dans son verre à chaque repas, tous les jours, chaque semaine de chaque mois. Et sourire au vieillard qui à petit feu s'éteignait sans le savoir. Lui sourire, lui assurer d'être là, de le soutenir tout au long de sa maladie, de cet affreux cancer, oh oui. Terrible.
Oui, Montague avait souri. Le monstre s'était libéré de ses chaînes, et il ne s'était jamais senti aussi puissant qu'en ces instants de détresse pour ses prétendus proches.
De regrets ? Pour quoi faire ? Montague avait toujours voulu ça. Il lui avait seulement fallu être patient. Il n'avait aucune éducation, ne connaissait rien aux affaires. Il lui avait fallu gagner la confiance du vieux Fauster. En s'amourachant d'Emma, ça avait été plutôt facile. Apprivoiser l'animal en lui avait été beaucoup plus difficile, mais il y était parvenu. Il avait eu peur de perdre cet instinct, à une certaine période, mais il lui suffisait de repenser à son enfance pour aussitôt le retrouver. Il ne le quittait jamais vraiment, c'était comme une tache de naissance.
Ça faisait partie de lui.

Emma... Montague fit remuer les glaçons dans son verre, les faisant tinter les uns contre les autres. Elle avait été tellement chagrinée à la mort de son père... Il aurait presque été touché par ses larmes. Presque. Mais ça n'avait fait qu'effleurer son subconscient. Plus de quatorze ans qu'il côtoyait cette femme, cette femme qui l'aimait démesurément, et tout n'avait été qu'un mensonge. Un odieux mensonge, à long terme. Pour arriver à ses fins, Montague avait fait bien des sacrifices. Il était loin de détester Emma, c'était une femme charmante, pas trop mauvaise au lit. Mais elle était la fille d'Harvey, et une potentielle concurrente à la place qu'il convoitait. Montague n'avait aucun scrupule, et il n'avait pas hésité une seule seconde à faire disparaître Emma. Enfin, disparaître...
Il se souvenait encore de son air absolument horrifié lorsqu'il s'était avancé, le couteau à viande en main. Il avait planifié l'événement des centaines de fois dans son esprit. Il l'avait attrapée par la gorge d'une main, le couteau dans l'autre, et lui avait demandé de se taire, le sourire aux lèvres, lui intimant des « Shhh » délicats. Personne ne pouvait les entendre. Emma ne comprenait pas, elle était pétrifiée. Elle ne comprenait pas pourquoi l'homme qu'elle avait épousé se montrait si menaçant avec elle. Montague n'écoutait même pas ce qu'elle sanglotait. Il se délectait de la peur dans ses yeux, et surtout, il se délectait d'avance de comment les choses se dérouleraient. Alors qu'elle émettait des « pourquoi » incessants, il avait plaqué la lame sur les lèvres de la jeune femme, pour qu'elle arrête de parler. Ce fut efficace. Et lui, tout ce qu'il s'était contenté de répondre, taquin et malsain, fut : « Pour ton argent, voyons ! » Et il avait tranché la chair, fine, de son cou, sectionnant la carotide, laissant un flot de sang se déverser sur le buste de sa compagne.

Montague prit une profonde inspiration. Il avait perdu une chemise hors de prix avec cette histoire, mais ce n'était pas grave. Harvey l'avait nommé sur son testament, et son mariage avec Emma lui assurait de récupérer la part de celle-ci. Il était satisfait. Il avait parfaitement oeuvré. Et il était seul au sommet.